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citations textiles
Mise en route du chauffage...
«Le premier de ce dernier mois [novembre] elles pouvaient prendre leur station d'hiver à la cheminée. Ce jour-là seulement Grandet permettait qu'on allumât du feu dans la salle, et il le faisait éteindre au trente et un mars, sans avoir égard ni aux premiers froids du printemps ni à ceux de l'automne. Une chaufferette, entretenue avec la braise provenant du feu de la cuisine que la Grande Nanon leur réservait en usant d'adresse, aidait madame et mademoiselle Grandet à passer les matinées ou les soirées les plus fraîches des mois d'avril et d'octobre. La mère et la fille entretenaient tout le linge de la maison, et employaient si consciencieusement leurs journées à ce véritable labeur d'ouvrière, que, si Eugénie voulait broder une collerette à sa mère, elle était forcée de prendre sur ses heures de sommeil en trompant son père pour avoir de la lumière. Depuis longtemps l'avare distribuait la chandelle à sa fille et à la Grande Nanon, de même qu'il distribuait dès le matin le pain et les denrées nécessaires à la consommation journalière.»
Et ben ça, c'est de l'économie domestique... enfin vue par le père Grandet... et si bien racontée par Balzac dans le roman «Eugénie Grandet». Mais qui a donné lieu à assez peu de versions cinématographiques, à aucune en tout cas depuis une trentaine d'années. Les plus nombreuses adaptations ont été faites après 1945, et dans de nombreux pays, peut-être parce qu'il fallait relancer la consommation et mettre fin aux mesures drastiques que beaucoup de ménages avaient été obligés d'adopter pendant la Deuxième guerre mondiale en montrant un cas caricatural. Peut-être aussi, parce que de tous les péchés, l'avarice est le plus triste et fade à montrer... C'est dommage car Balzac fut d'une extrême précision pour tout ce qui concerne le costume, la toilette comme on disait alors. Et même sur un costume d'avare, il déployait son extraordinaire talent. Par ailleurs, Balzac, selon Marguerite Gagneux-Granade, a employé cinquante fois le verbe «tricoter, et quinze fois le mot «tricot» dans son œuvre littéraire, ce qui est probablement un record.
Bonne lecture au coin du feu ! ou en tout cas au chaud !
Chandail rose
«Elle regarde la télévision tout en tricotant un chandail de laine rose.
Oscillant mollement sur son rocking-chair, elle s’est à moitié assoupie. Comme elle tourne le dos à la porte, elle ne voit pas la silhouette qui vient de pénétrer dans la pièce. Elle tricote de plus en plus lentement. [...]
Le rocking-chair cesse son mouvement de va-et-vient. Les mains abandonnent les aiguilles, posent le chandail rose. Elles frottent les yeux, prennent le coffre, le posent sur les genoux. Puis les mains partent à la recherche de lunettes dans le panier à tricot, et en ramènent... un gros revolver.»
Tous les stéréotypes de la pratique du tricot sont réunis dans cette brève citation... sauf le gros revolver évidemment. Avec un tel instrument de travail, l’avancement du chandail risque d’être un peu ralenti... déjà que cette tricoteuse était à moitié assoupie... on peut s'endormir en lisant un roman moyen, jamais en tricotant ! cette histoire du rire est un peu longuette, espérons seulement que son auteur ne s'attaquera jamais à l'histoire du tricot.
Extrait de «Le rire du Cyclope» de Bernard Werber, édité par le Grand livre du mois en 2010
Éloge du raccommodage...
Superbes monuments de l'orgueil des humains,
Pyramides, tombeaux dont la vaine structure
A témoigné que l'art, par l'adresse des mains
Et l'assidu travail, peut vaincre la nature ;
Vieux palais ruinés, chef-d'œuvre des Romains
Et les derniers efforts de leur architecture,
Colisée, où souvent ces peuples inhumains
De s'entr'assassiner se donnaient tablature ;
Par l'injure des ans vous êtes abolis,
Ou du moins, la plupart, vous êtes démolis ;
Il n'est point de ciment que le temps ne dissoude.
Si vos marbres si durs ont senti son pouvoir,
Dois-je trouver mauvais qu'un méchant pourpoint noir,
Qui m'a duré deux ans, soit percé par le coude.
Ce sonnet est de Paul Scarron, auteur burlesque du XVIIe siècle, époque où l'on reprisait et rapiéçait tant et tant qu'il valait mieux en faire des rimes plutôt que s'en plaindre.
Mais pour combler les accrocs causés par l'usure comme dans le cas du pourpoint de Scarron, par les déchirures, les brûlures et autres avanies, il y a trois techniques possibles.
Repriser : combler le trou avec du fil et une aiguille, avec des points simples ou plus proches de la broderie, même si en général on cherche la consolidation du vêtement plutôt que la décoration.
Rapiécer : ajouter une étoffe qui vient combler le trou, que cette étoffe soit identique à celle du vêtement ou différente. Cette dernière technique est très utile sur les vêtements d'enfants. Il y a même des pièces toutes faites en cuir ou simili que l'on trouve dans toutes les merceries - des «genouillettes» comme me disait naguère un expert de six ans en genoux percés...
Pourquoi ce billet ? parce qu'il pleut, parce qu'une pile de reprises et réparations m'attend et qu'en musardant autour, dans l'espoir que l'ouvrage se fasse tout seul... j'ai trouvé ce bon vieux Scarron dans ma bibliothèque. Maintenant, au boulot !
Initialement publié sur ce blog le 27 février 2017... mais c'est d'actualité en cette Journée de la poésie !
1 repriser - 2 rapiécer - sources inconnues
Mythologie grecque
«Il est une déesse inconstante, incommode,
Bizarre dans ses goûts, folle en ses ornements,
Qui parait, fuit, revient et nait dans tous les temps
Protée était son père, et son nom c'est la Mode»
Ce Protée a eu plusieurs descendants discrets, d'autres plus fâcheux... En tout cas, il fallait bien être Voltaire pour ajouter avec autant de désinvolture une nouvelle déesse à la mythologie antique pourtant déjà si riche. Mais quand on y pense, c'est tout de même bizarre qu'il n'y ait pas eu de dieu ou déesse de la mode dans l'antiquité, car la mode existait déjà.