ce que fait la main
Jeux de ficelle
Kaninikula, c’est le nom des jeux de ficelles aux iles Trobriand. Et Éric Vandendriesshe, ethnomathématicien, en explore le fonctionnement en y recherchant les procédures mathématiques mises en œuvre par les praticiens de ces jeux. C’est ce qu’il montre dans ce court-métrage de 2012.
Les jeux de ficelles avaient déjà fait l’objet d’un billet dans ce blog, il y a quelques années, auprès d’autres populations du Grand Nord. Et Watana.
Les couturières n’ont pas dit leur dernier mot...
À regarder absolument, le documentaire Le siècle des couturières de Jérôme Lambert et Philippe Picard, qui d’ailleurs déborde largement sur toutes les travailleuses de l’industrie textile française, du milieu du XIXe siècle à nos jours.
Si l’industrie textile fut fondamentale dans la révolution industrielle, qui se souvient qu’une large partie de la main-d’œuvre était féminine, alors que le monde ouvrier est largement représenté comme exclusivement masculin. Ce documentaire consacré à ces ouvrières invisibles qui ont pourtant joué un rôle fondamental dans la production industrielle et dans les luttes syndicales. Mais cette industrie a quasiment disparu entre 1970 et 2000, les emplois féminins délocalisés. Or, naguère, de qui a-t-on eu besoin pour coudre des masques ? D’ailleurs, le documentaire se termine sur une note légèrement optimiste en abordant l’amorce du renouveau de la filière textile française.
Documentaire disponible sur France3 jusqu’au vendredi 6 mai 2022
Voix off : Corinne Masiero.
Pour en savoir plus : lire ici...
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Regrets sur mon vieux dé à coudre
...Pourquoi ne l’avoir pas gardé ? Il était fait à moi, j’étais faite à lui. Il moulait le bout de mon majeur droit sans le gêner, j’étais rapide et efficace. Le nouveau, encore brillant, me glisse du doigt. Il n’y avait aucun besoin auquel sa complaisance ne se prêtât. Un tissu refusait-il de se plier, son bout s’offrait à l’aplatir à l’endroit de la couture. On y voyait tracés en alvéoles profondes les fréquents services qu’il m’avait rendus. Ces trous annonçaient la femme qui brode, qui coud. À présent, j’ai l’air d’une néophyte dilettante du DIY...*
Mon vieux dé à coudre, qui tant cousit depuis plusieurs décennies qu’un trou en fut percé au bout ! Pendant quelque temps, je l’ai utilisé encore en prenant bien soin de presser l’aiguille ailleurs qu’à l’endroit du trou. Cela eut un temps. Puis un deuxième trou se signala douloureusement à mon majeur. Las ! en regardant à contrejour, le bout du dé m’apparut comme une quasi dentelle de métal. Il fallut me résoudre à remplacer ce petit objet si secourable de ma boite à couture.
Bien qu’on me dise aussi beaucoup de bien des dés en silicone comme celui-ci :
ou cet autre :
Il y en a aussi en corne, très agréables à utiliser, en bois, en cuir... mais je demeure adepte de la forme classique en laiton nickelé qui est comme une armure sur la dernière phalange. Et le nouveau dé, soit qu’il fût trop petit, soit qu’il fût trop grand... bref, il me fallut en essayer trois avant de trouver dé à mon doigt. Mais nous voilà tous deux partis vers un radieux avenir de couture.
L’achat d’un dé, que nous présentons toujours comme vital aux débutantes, qui bien souvent en ignorent jusqu’à l’existence, est un investissement très durable, pour quelques euros tout au plus. Songez-y !
* Pour celles et ceux qui ne l’auraient pas reconnu, le texte en italique compris entre ... et ... est librement démarqué des « Regrets sur ma vieille robe de chambre » de Diderot. Merci Denis !
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Trou suspect...
«La foule se précipita en avant avec un rugissement de curiosité et Howard se trouva porté jusqu’au corps de George. [...] Il prit une rame qui allait vers le centre. Habituellement, il était très sensible au bruit et au grincement du métro, acier sur acier, lui était une intolérable torture, mais à présent, il l’oubliait et s’accrochait à une poignée, reconnaissant de leur indifférence aux autres passagers plongés dans leur journal. Sa main droite, toujours glissée dans sa poche, en chercha automatiquement le fond. Il faudrait qu’il recouse cela dès ce soir. Il baissa les yeux et découvrit – le choc lui fut presque douloureux – que la balle avait troué le tissu. Il sortit rapidement sa main de sa poche et la plaça sur le trou, sans quitter le placard publicitaire qui lui faisait face. [...] Et personne ne l’avait vu tirer, il en était sûr. [...] À présent, il devait penser à se débarrasser d’abord du manteau. Il était trop dangereux de faire stopper ce genre de trou. Cela ne ressemblait pas à une brûlure de cigarette, cela ressemblait bien à ce que c’était...»
Si ce personnage de «Un alibi parfait» de Patricia Highsmith ne connait pas de stoppeuse discrète, encore sait-il ce qu’est le stoppage, ce que beaucoup de nos contemporains ignorent désormais, à notre époque de prêt à porter jetable.
En tout cas, n’assassinez personne à Toulouse en trouant bêtement la poche de votre manteau ou de votre veste, car il n’y a pas de stoppeuse à Toulouse, même s’il y a beaucoup de retoucheuses qui effectuent toutes sortes de réparations. Quant à le faire soi-même, c’est une autre affaire, nettement plus complexe que de recoudre un fond de poche... Stoppeuse fut naguère un métier qui nécessitait un assez long apprentissage car le but était de rendre invisible un trou dans un textile, non pas en le raccommodant, mais en reconstituant le tissage originel. Les stoppeuses sont maintenant rarissimes en France, quoique on sent frémir à nouveau une demande pour ce type de prestation en dépit de son coût assez onéreux, ce qui le cantonne aux vêtements de qualité, voire de luxe. Pour donner une petite idée de la nature de cette opération, on peut lire les quelques pages consacrées au stoppage à la toute fin de «Rapiécer et raccommoder» de Kerstin Neumüller, publié l'an passé par La Plage.
Que n’eut-il troué un pull ou une veste tricotée ? il aurait pu faire réparer cet accroc chez Couture en L, (36, rue Saint-Rémésy) qui pour réparer ce type de dégâts dispose de doigts experts...
P.s. «Un parfait alibi» est une des nouvelles publiées dans le recueil «Dernières nouvelles du crime», de Patricia Highsmith, chez Robert Laffont, dans son inépuisable collection «Bouquins»
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